MONOGRAPHIE DE COURVILLE, Marne.

Référence

Par l'Abbé J. Galland, Curé de Courville.
N.B. Il s'agit d'un cahier, original, de 192 pages manuscrites à l'encre violette. Il porte les dédicaces suivantes :
« Souvenir offert à M. le Comte de Chantérac, Courville le 29 septembre 1927.
J. GALLAND
Curé de Courville. »

« Monographie de Courville. Exemplaire appartenant à M. le Comte de Chantérac Paris rue de Lisbonne 24 (VIII°). Lui faire parvenir.
J. GALLAND
Les cahiers ne sont pas cousus ensemble pour laisser place aux pages que voudrait y ajouter M. de Chantérac pour y coller des photographies ou des cartes postales. »

Nous ne reprenons ici que des extraits et tout particulièrement ceux qui font état de la Famille Bracquemont, du château et de la Grande Guerre.
Référence est faite à la pagination du texte original.

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L'EGLISE. (P. 1l)

Dans le bras droit du transept, au dessous de la fenêtre, existe une double arcature avec tores et colonnettes d'un bel effet. La fenêtre en plein cintre nous montre une jolie verrière, sujet en pied : St. Stanislas de Kostka, don de la famille Bracquemont du château de Courville en 1895. On y voit les armoiries des Aubé de Bracquemont et des Desrousseaux de Vandières. Ce vitrail, fortement endommagé en 1918 a été réparé aux frais de la famille…

TRAVAUX DIVERS FAITS A L'EGLISE (1771-1923)

En 1890. Le conseil de fabrique recueille un legs de 4 322 francs 50 centimes fait par Melle Régine STRUE, originaire de Bavière, femme de chambre de longue date de la famille de Bracquemont du château de Courville… (P. 41 et 42).

En 1895. La famille de Bracquemont du château fait alors don à l'église de deux jolies verrières, sujets : St Stanislas de Kostka et St Adrien, martyr pour les fenêtres du transept. (De tous ces vitraux il ne reste que la verrière restaurée de St Stanislas, tout a été réduit en miettes lors de l'explosion du château en 1918. ) P. 42.

En 1900. Dallage du bas coté Nord. Boulonnois, Maçon. Porte neuve en chêne au petit portail, Bobe, Menuisier, Regrattage des murs, colonnes, chapiteaux, voûtes et tracés d'appareils au carré du transept, 1350 francs, don de M. Sosthène de Bracquemont, du château (Lejeune de Sedan, entrepreneur). P. 43

En 1922. Réparation du vitrail du bas du transept méridional représentant St. Stanislas de KOSTKA donné en 1895 par la Famille de Bracquemont – Desrousseaux ; les écussons des deux familles figurent dans le bas du vitrail. (Labouret de Paris, peintre sur verre). P. 45

CHATELLENIE ET CHATEAU DE COURVILLE (P. 59)

La terre de Courville avait été donnée aux archevêques de Reims par Warat pour former l'apanage du duché de Reims dont l'Archevêque était titulaire et qui comprenait Chaumuzy, Cormicy, Courville, Bertheniville… (vers l'an 1179)… Cette châtellenie avait 15 000 livres de revenus provenant de cens, rentes, lods et ventes, amendes, terres labourables, prés, bois, vignes, dîmes, moulins, pressoirs, canaux, étangs, garennes etc. L'ancien château fort fut démoli et la tour lui survécut. La demeure seigneuriale a dû être reconstruite au XIV° siècle ; on y fait des réparations au XV° et XVI° siècles. L'église et le château ne sont séparés que par une rue étroite et sont situés dans le haut du village….
P. 61. Château de Courville. Revenons un peu sur nos pas et nous nous trouvons en face des ruines du château : une immense excavation et puis un amoncellement de pierres et de détritus de toutes sortes. C'était en 1918 une solide et belle construction, massive il est vrai ; quatre tourelles l'encadraient, deux portes d'entrée sur la façade, l'une pour le couloir, l'autre pour le salon ; ces portes étaient surmontées d'un fronton orné de moulures du XV° siècle, bien conservées avec écussons dans le milieu aux armes des Cardinaux de Lorraine. Un perron régnait sur toute la largeur de l'édifice. La restauration complète en avait été faite en 1882 par le père du propriétaire actuel, après l'acquisition. Derrière le château s'étend un parc assez spacieux, rempli d'arbres de toutes essences ; sur le côté droit sont les communs, remises, écuries, granges et logement du jardinier-concierge ; sur le côté gauche sont les caves et un petit jardin potager….

COMMUNE DE COURVILLE (P. 119 et 120) – FIN DE LA SEIGNEURERIE DE COURVILLE, VENTES DU CHATEAU ET DE TOUTES SES PROPRIETES.

La seigneurerie de Courville n'existe plus ; le château et toutes ses propriétés deviennent biens nationaux (nous sommes en 1792) et sont mis en vente par divers lots ; nous ne nous occuperons que du château et de sa ferme principale : la Bonne Maison.

Vente du Château.

Le château devient la propriété du citoyen Legoix, inspecteur des octrois de Reims. Ce Legoix serait-il parent de Louis Legoix, écuyer, seigneur de Horemberg, demeurant au château des Marais et de son épouse Marguerite de l'Espine vers 1727. Le fils s'appelait Louis François.

Le château fut ensuite propriété de la famille DUCHASTEL (le Chanoine Duchastel de Soissons qui vivait encore en 1925 était le petit-fils des Legoix : il aimait à raconter qu'il avait passé son enfance au château de Courville) et plus tard de Pierre Marie Lamessine, époux de Marie-Rose Bénard, dont le fils, avocat à Soissons fût marié à une très jeune personne Juliette Lamber. Sans aucune inclinaison pour son mari, elle s'est bien vite séparée de lui ; elle vint au château de Courville car elle en parle dans ses mémoires ; son mari a vécu en Algérie et y est décédé : c'est après sa mort qu'elle se remarie avec le Sénateur Edmond Adam ; femme de lettre, elle signe ses articles et ouvrages sous le nom de Juliette Adam, elle fut en relation avec tous les fameux personnages de l'époque de 1870 et années suivantes. Elle vit encore actuellement. Interviewée en 1913 par l'auteur de ces lignes sur ses souvenirs de Courville, elle a répondu qu'elle préférait le silence, ayant conservé de ses séjours au château de Courville dans cette famille de trop mauvaises impressions ; ces paroles confirmaient ce qu'elle insinuait antérieurement dans son volume « Mes premières années littéraires et politiques » page 79 : «  Mon mari passant une semaine à Courville dans sa famille, j'en avais profité pour lancer mon œuvre dont il ne connaissait pas le premier mot ». Il s'agissait d'un ouvrage intitulé : «  Idées anti-Prudhonnienne ». Le dictionnaire Larousse la désigne ainsi : «  Adam (Juliette Lamber, dame) femme de lettres française, née à Verberie (Oise) en 1836 ». NDLR le Larousse de 1978, indique son décès en 1936 et ajoute «  son salon eut une grande influence à la fin du XIX° siècle ».
Le château n'était plus entretenu, plusieurs locataires l'habitent, il devient même une auberge et c'est là que l'on danse chaque dimanche, Pierre Lamessine meurt à Courville, à 77 ans le 8 Juillet 1862 : le château est acheté par M. Desingly Féliz Jules, marié à marie Caroline Docq (décédés tous deux : à Hourges vers 1900). Vers 1880 le château est encore revendu à M. Sosthène Aubé de BRACQUEMONT, ancien chef de division au Ministère des Finances, en retraite, Chevalier de la Légion d'Honneur ; celui-ci achète successivement les bâtiments de l'ancienne ferme et divers lots de terrain qui faisaient partie de l'ancien parc ; il rachète aussi certaines dépendances qui avaient été converties en usine où on y distillait des betteraves pour en faire de l'alcool ; ce fut une transformation complète de la propriété et du château et une vraie demeure de plaisance.

GRANDE GUERRE 1914 – 1918.

La guerre est déclarée à la France par les Allemands ; le décret de mobilisation est envoyé le 2 Août ; Courville a plus de 80 hommes mobilisés pendant les quatre années de guerre. On est en pleine moisson et il n'y a plus de bras pour les travaux ; d'ailleurs la réquisition des chevaux par l'armée enlève tout moyen de transport des récoltes : il faut se résigner à voir tout dépérir. Le pays est en effervescence : on fait circuler des bruits d'espionnage et pour y obvier, on constitue dans le village un poste de garde de nuit à l'intersection des routes ; les hommes de tous âges restés au pays se relèvent ainsi tour à tour, cela dure environ trois semaines. Mais voici qu'arrive la nouvelle de nos défaites sur la Belgique : de nombreuses troupes françaises passent sur nos routes se dirigeant le 1° septembre vers la rivière de la Marne, Châtillon et Dormans, c'est la fuite précipitée, car les Allemands les poursuivent à quelques heures d'intervalle ; on voit passer en même temps une foule d'émigrés de l'Aisne, des Ardennes et des environs, se dirigeant également vers la rivière de la Marne, c'est une vraie panique. Le mercredi 2 Septembre le branle est donné, Courville se dépeuple en partie, les uns suivant la masse des émigrants, les autres allant se cacher dans les bois ou les carrières des environs. Les Allemands arrivent à Courville vers 10 heures du soir ; le Prince Ettel et son état-major occupent le château et les troupes couchent dans le village pendant deux nuits ; il y eut peu de dégâts, quelques pillages isolés ; d'ailleurs les Allemands n'avaient pas le temps de cantonner… Le vendredi 11 Septembre, au matin, vers 10 heures, passages à deux reprises d'une centaine de prisonniers français dirigés à pied sur Fismes. On ne voyait plus un seul Allemand quand vers 3 heures du soir on entend galoper à franc étrier une escouade de uhlans venant de la direction de Mont sur Courville – Saint Gilles et aussitôt une compagnie de chasseurs à cheval français les poursuivant. Arrivés au centre de Courville les Allemands font un crochet vers les bois… Ils seront plus tard obligés de se rendre partiellement, mais deux cavaliers Allemands s'étant dirigés à travers champs vers la route de Fismes sont atteints et tués à 500 m. de Courville. La petite troupe française vient alors se masser vers le milieu du village et y reste en expectation pendant une demie heure. Soudain elle reçoit ordre de rebrousser chemin. La joie était grande de revoir nos soldats, mais le canon tonne au-dessus du village : l'artillerie française est postée entre Mont et Saint Gilles sur la hauteur et lance des obus de 75 vers l'artillerie allemande établie dans la direction de Fismes-Magneux sur la hauteur ; ce duel d'artillerie au-dessus de nous dure jusqu'à la nuit et recommence de bonne heure le samedi 12 Septembre jusque 7 heures du matin. Nous apprenons la victoire de la Marne, car, voici les troupes françaises qui reviennent refoulant à leur tour l'armée allemande vaincue. Quelques cyclistes allemands étaient revenus au milieu du village le vendredi vers 6 heures du soir pendant le duel d'artillerie, mais le samedi à 10 heures du matin, on redevient libre : la pluie commence à tomber et vers le soir c'est une pluie diluvienne ; les pauvres troupes françaises arrivent en masse au village ; toutes les maisons sont occupées et deviennent même insuffisantes pour les abriter, la majeure partie des troupes couche en plein champ. L'état-major du Général Baratior est installé au château. Le lendemain dimanche 13 septembre vers 8 h. du matin, départ des troupes ; Fismes est aussi débloqué ; notre armée va poursuivre l'ennemi jusqu'au Chemin des Dames ; nous sommes dans la joie de la délivrance, mais la tristesse l'accompagne, car si nous parcourons la contrée partout où les diverses troupes ont passé, ce sont meules de grains fondues, pillées, piétinées ; champs de blé et d'avoines dévastés ; à chaque pas des cadavres de chevaux en putréfaction, des débris de toutes sortes, voitures brisées, prolonges abandonnées, bouteilles vides en nombre incalculable etc. C'est triste à voir ; et puis, chemins encombrés, terres défoncées ; mais nous revoyons nos soldats, l'espérance noua ranime. P. 139 à 143.

Le château siège de l'ambulance.

Au 1er janvier 1915 le château devient ambulance pour les malades… P. 146.

H.O.E. de Saint Gilles et Hôpital de Courville.

Jusque là (Avril 1916) l'ambulance du château n'avait servi que pour les malades mais on prévoyait une grande attaque sur le front ; c'est alors que le château devint le siège d'une grande ambulance pour les blessés (juillet 1916) ; on y a construit de nombreux baraquements avec distribution de l'eau, la désinfection, la radiographie, etc. Les 2 ambulances 13/17 et 3/61, font le service de 800 lits toujours occupés par les blessés. Plusieurs célébrités médicales y ont exercé au moment des fortes attaques : ils traitaient spécialement les opérations du crâne ; il y eut beaucoup de morts, plus de 200 enterrés dans nos cimetières de 1914 à 1918 (28 mai).
L'hôpital de Courville était relié à l'H.O.E. (Hôpital d'évacuation) de Saint Gilles situé à 800 mètres environ à la limite du territoire de Courville et de Saint Gilles ; le téléphone, l'électricité étaient en communauté pour leur service. Les grands blessés du crâne étaient envoyés à Courville par l'HŒ ; plus d'une douzaine d'ambulances groupées sous la direction d'un médecin-chef. Nous y avons vu en avril 1917 plus de 200 prêtres mobilisés comme infirmiers. P. 147 et 148.

« … En revenant à l'hôpital je trouvai devant le château un groupe de blessés et d'infirmières qui montraient un point en bas du château qui nous séparait da Fismes » regardez me disaient-ils, on vient de mettre en batterie quatre 75 « . Et de fait, les coups se succédaient, allant atteindre sans doute l'ennemi déjà proche. La belle défense en vérité que nous avions là. » P. 160,

« Le défilé des blessés continuait. Je revoie encore deux soldats dont l'un avait une jambe cassée qui pendait, soutenu par son camarade dont le bras en écharpe saignait sous le hâtif pansement ; ils avaient fait ainsi dix kilomètres et ils arrivaient pensant trouver enfin les soins et le repos. Hélas ! Que pouvions-nous pour eux ! Nous n'avions plus pour éclairage que des lanternes, nos pansements étaient épuisés ; les instruments, déjà enfermés dans des caisses prêtes à être chargées sur les voitures… La nuit maintenant était tombée et la canonnade s'était tue ; sur les brancards, dans la baraque obscure les blessés étendus geignaient douloureusement ; de temps en temps l'une de nous s'approchait avec sa lanterne, elle remplissait les quarts qu'on lui tendait avec le Champagne que nous avions trouvé dans les réserves, heures lugubres, heures poignantes où l'on se sent impuissantes devant le mal et devant la mort. A minuit, le médecin-chef nous réunit et nous annonça que nous allions partir.  » Et nos blessés«  répondîmes-nous ?   “J'ai fait ouvrir une porte qui donne accès dans les caves du château, nous allons y descendre les brancards ; le plus jeune des majors et deux infirmiers resteront avec eux”. En vain mes compagnes et moi, essayâmes-nous d'obtenir que l'une d'entre les infirmières fût désignée pour demeurer aussi près des blessés, nous nous heurtâmes à un refus absolu. Un à un dans l'ombre, les douze blessés intransportables furent descendus dans les caves ; sur une table on dispose quelques seringues, des ampoules et du champagne. Les deux infirmiers qui réclamèrent l'honneur de rester étaient deux prêtres. Silencieusement nous serrâmes les mains de ceux dont nous nous séparions, le cœur navré, puis nous sortîmes et les lourdes portes de la cave se refermèrent…  » – Extraits de « exode d'une ambulance » par Mlle Henriette Dalligny. Une note en bas de page précise «  Ces pauvres abandonnés ont pu être convoyés avant l'arrivée des Allemands » P. 160 -162.

Evacuation de Courville. (1918)

Au récit fidèle de l'infirmière major nous ajoutons quelques détails au sujet de la population civile de Courville. Le capitaine du cantonnement reçoit l'ordre vers 4 heures du soir 27 mai, de faire évacuer ce qui reste de chevaux et de bêtes à cornes dans les maisons de culture et de faire lâcher dans les cours les autres animaux et les volailles. Tout d'abord on se montre récalcitrant ; mais peu à peu en voyant que la population se met à émigrer les départs s'accentuent ; les émigrants sillonnent les routes, c'est une véritable déroute. Le maire va lui-même dans chaque maison donner l'ordre du départ ; il faut partir ; les gaz asphyxiants avaient le matin incommodé bien des personnes, le même inconvénient pouvait reprendre et puis on pouvait se trouver en plein dans la bataille ; donc ordre de partir ; presque toute la population obéit ; il reste néanmoins un certain nombre de personnes âgées et quelques unes valides, environ 50 de Courville. M. Louis Vernier faisant fonction de maire ayant son épouse très malade et non transportable se résigne à rester. Alors la pauvre population erre sur les chemins pour aller se disperser par toute la France. Quelle lugubre procession. P. 163 – 164.

Courville – Occupation Allemande. 28 mai – 2 août 1918.

Aussitôt le combat de la Bonne Maison le 28 mai 1918, vers 3 heures du soir Courville est envahi par les Allemands ; leur arrivée est signalée par de véritables orgies ; il y avait du vin dans les caves, ce furent des beuveries coutumières à ces brutes pendant deux jours, aussi bien les chefs que les inférieurs. Le deuxième jour de leur arrivée ils mirent le feu à la maison d'un marchand de vin en gros, Saurain BOBE, après avoir mis de côté le stock des futailles pleines. Installés au château et dans les maisons du village ils y ont organisé leur cantonnement y travaillant le jour et surtout la nuit. Nous avons dit qu'il était resté une cinquantaine de personnes qui n'avaient pas voulu émigrer à cause de l'âge ou de la maladie, en voici la liste…
De cette liste 22 sont déjà décédés au 1er Novembre 1926.
A ces habitants il faut joindre quelques personnes de Fismes, de Lagery et des environs qui ont été évacués sur Courville par les Allemands, entre autres le curé de Lagery, l'abbé Marie Joseph Arthur BERLAND, né à Pontgivart en 1847 et curé de Lagery depuis 1877 et ses deux sœurs également âgées ; celui-ci meurt à Courville dans une cave le 12 juin 1918 et a été enterré au cimetière sans cérémonies religieuses et même sans cercueil.
Sur l'ordre de la kommandantur tous les habitants, hommes et femmes devaient se rendre à l'appel deux fois par jour et on leur désignait les travaux à faire ; ils devaient travailler 10 heures par jour, les hommes aux champs, les femmes à la cuisine, à la couture, au lessivage, au soin de la laiterie. Ils avaient pour toute nourriture 120 grammes de pain par jour, et quel pain ! Ils n'avaient pas le droit d'être dehors avant 6 heures du matin, ni après sept heures du soir. Un habitant de la commune, PORTELETTE père, charpentier, dût faire deux jours de prison pour avoir été chercher des pommes de terre dans son champ déjà fouillé par les Allemands, et il dût un mois durant coucher dans une voiture car on le mit à la porte de sa chambre, où, d'ailleurs il n'y avait plus ni matelas, ni couverture.
Les Allemands dés leur arrivée ont enlevé par trains entiers les meubles les plus précieux, l'outillage des ateliers, les animaux, chevaux, vaches, porcs, lapins et volailles, les récoltes de foin, de blé, d'avoine, de pommes de terre et de carottes. Plusieurs habitants durent quitter leur maison pour se rendre dans une autre vacante et désignée, et pendant ce temps, les Allemands déménageaient de chez eux tout ce qui leur semblait bon à emporter. Beaucoup croyaient qu'en restant avec les Allemands ils sauveraient leur avoir, quelle déception !
Le château devint le séjour de 1'état-major ; la maison Lemaire fût siège de la kommandantur ; l'église servit de dortoir ou plus de 250 lits furent installés ; le parc du château où il y avait de vastes baraquements pour l'hôpital conserva sa destination. Comme nous l'avons dit plus haut les trois cloches de l'église furent descendues, brisées, enlevées. Courville fût pendant cette époque bombardée presque chaque jour par nos avions ou ceux des américains. Un matin, le 21 juin, vers 11 heures, des avions français bombardent le ravitaillement près de la gare ; il y eut 22 Allemands tués, plus de 25 chevaux et 120 blessés. Ils avaient amené à Courville 400 wagons environ de bois, planches, ferraille, traverses et rails pour établir une ligne de chemin de fer se dirigeant sur Arcis-le-Ponsart, vers Dormans, ces grands travaux étaient exécutés par des prisonniers. Or un certain jour, traverses, rails rebroussèrent chemin, on comprit alors que les affaires n'allaient plus au gré des Allemands. Peu de temps avant était passé un train de 30 wagons pleins de morts et de blessés. Parmi les hommes en cantonnement se trouvaient plusieurs alsaciens et lorrains qui confiaient aux habitants que leur défaite était proche et qui s'en réjouissaient à l'avance. L'espérance renaissait dans les cœurs.
Trois jours avant leur fuite, les Allemands réunirent tous les habitants sur la place et désignèrent une douzaine d'hommes et de femmes qui n'avaient pas 60 ans et les envoyèrent vers Hirson, ce sont : Dussaussois, Alexandre Bouvier, Alliot et sa femme, Dabremont et sa femme, Laurent, Tinquier et sa femme, le commis boulanger etc, puis ils enjoignirent aux habitants de se réfugier dans des caves désignées par eux dans le bas du village et où ils avaient placé des vivres, avec défense absolue de sortir. Pendant ce temps-là ils disposaient des explosifs dans les maisons et principalement dans les caves. C'est le 2 août 1918, au petit jour, que les Allemands quittent Courville. On pouvait lire alors sur la porte du petit portail de l'église cette inscription allemande : «  nous voulons la paix avec l'aide de Dieu ». Quelle ironie ! on va voir comme ils se moquaient de Dieu. L'Echo de Paris du samedi 24 août 1918 N°12426, cite une lettre non expédiée d'un soldat allemand de la 4° Cie de M T de la garde « 4° D.G. » : « 3 août 1918, je suis parti de Mareuil-en-Dôle que la division avait quitté depuis plusieurs heures, les derniers éléments d'infanterie (5° garde à pied, 93° réserve) étaient déjà partis pour Fismes où une position d'arrêt devait être créée à la hâte. Les éléments des divisions voisines déjà repliées, ainsi que les troupes encore intactes, notamment le 5° grenadier de la garde (non engagé) devaient travailler à l'établissement de celle-ci. Las fantassins disaient au départ : à présent il faut renoncer à l'espoir de finir victorieusement la guerre. Toutes les divisions encadrant la 4° D.G. avaient également la région de Fismes comme point de rassemblement, le 2 août au soir. Les sapeurs de la division avaient reçu des ordres particulièrement rigoureux de leur général Finck von Finckenstein, et les bombardiers de leur lieutenant Müller, pour détruire tout pendant la retraite, notamment les châteaux et les maisons de belle apparence. »
L'ordre fût bien exécuté : le château de Courville (EXPLOSION DU CHATEAU ) entouré pour le moins de 40 torpilles sauta dans une explosion formidable, d'un seul coup, dès la première heure du jour, le 2 août 1918 ; ses caves avaient aussi reçu des torpilles ; furent-elles oubliées, ou bien y eût-il interruption de conduites, elles restèrent intactes. En un instant, de cette demeure imposante, séculaire, il n'en fût plus qu'un amas de pierres. Pendant ce temps beaucoup de maisons dont les caves étaient également minées sautaient à leur tour. Les barbares, après avoir enlevé tout le matériel de l'hôpital y mirent le feu ; ils incendient également les maisons Nora, Boulard, Ragot-Maloiseau, Vincent, les 3 maisons du Pacifique Pouillon, deux granges situées dans le haut du village ainsi que la gare. De même ils font sauter en se retirant les deux ponts sur l'Ardres.
Quand eût lieu l'explosion formidable du château, les habitants, enfermés dans les caves du bas du village et couchés sur le sol, furent soulevés à une certaine hauteur par la commotion. Aussi on s'explique les dégâts causés à l'église située à peine à 30 mètres du château ; on a vu d'ailleurs ce qu'elle a souffert.
Sur 120 à 130 maisons d'habitations existant alors à Courville il n'y eût pas 15 maisons exemptes de dommages par suite des mines ou des bombardements après le départ des Allemands ; une trentaine de maisons furent entièrement détruites.
Quelle Joie pour les habitants enfermés dans les caves quand ils virent arriver de Mont-sur-Courville, St. Gilles, les dragons français, puis le 120° d'Infanterie qui allait loger à la Bonne Maison : on leur donna du pain, du tabac, mais cette délivrance ne les mettait pas en sureté ; Courville allait subir encore constamment des bombardements. Les Américains prennent possession du village et décident l'évacuation de toute la population. Quand le 120° d'Infanterie française est passé à Courville le 2 août au matin il y avait sur la place de la Mairie des tableaux de valeur ; à certains on avait coupé les toiles et laissé les cadres ; le tout était empaqueté ; sans doute les Allemands n'ont pas eu le temps de les emporter. Les officiers firent placer dans certaines maisons ce qu'ils avaient trouvé, mais, après le départ des Américains et des automobilistes français on n'a plus rien retrouvé.
On n'était plus en sûreté dans Courville à cause des bombardements, les Américains avaient évacué les habitants sur Arcis-le-Ponsart ; ceux d'Arcis avaient eux-mêmes été dirigés sur Muscourt, Aisne, par les Allemands ; mais voilà que Arcis lui-même est menacé par les bombardements ( un obus atteint malheureusement deux de nos concitoyens de Courville : Anatole Drot et Portelette père lesquels sont tués sur le coup ; c'est alors que les américaine transportent tous les rescapés vers Sens d'où ils sont dirigés vers le centre de la France.
Tout le mois d'août et celui de septembre surtout, les obus allemands tombent sur Courville ; les Allemands sont toujours à Fismes ; on a pu voir les routes, les champs, les bois, les demeures criblés de trous plus ou moins profonds suivant les projectiles lancés par l'ennemi. Le mois d'octobre arrive, les Allemands quittent la Vesle. Courville est alors délivré ; quelques habitants émigrés au-delà de la Marne se hasardent à revenir dans leurs ruines ; c'est difficile car il n'y a pas de ravitaillement. P. 168-176.

COURVILLE APRES L'ARMISTICE – 11 NOVEMBRE 1918

Retour des émigrés.

Enfin l'armistice est conclu, plusieurs familles reviennent par groupe s'installer dans ce qui reste de leurs demeures, ravitaillées par l'autorité militaire, mais beaucoup d'autres étaient émigrées fort loin, dans l'ouest, le centre et le sud-ouest de la France, c'était coûteux de faire le voyage de retour à ses frais : pour obtenir la gratuité du retour, il fallait solliciter de la Préfecture de la Marne les pièces nécessaires et on ne les obtenaient qu'au bout de plusieurs semaines. Aussi en fin de janvier 1919, il n'y avait guère que 120 rentrées, néanmoins, on vit peu à peu revenir presque toute l'ancienne population. L'autorité militaire cessa le ravitaillement en nourriture et en boisson le 1er mars 1919 ; mais déjà un habitant, de Courville, Saurain Bobe, allait régulièrement, plusieurs fois par semaine vers Dormans et ramenait beaucoup de provisions en épicerie, légumes, vin, qu'il revendait aux amateurs ; en une demi-heure tout était enlevé ; il aurait fallu recommencer chaque jour. Quelques cultivateurs étaient rentrés en janvier et avaient amené des bêtes à cornes, ce qui procura le laitage, grande ressource pour les enfants, les vieillards et les personnes maladives. Les pauvres demeures étaient dans un état lamentable, plus de carreaux aux fenêtres ; il fallait se préserver des intempéries, de la pluie, de la neige, du vent, du froid en clouant du papier huilé pour remplacer les vitres ; mais quelle pauvre fermeture, bien précaire ! Les toitures étaient pour la plupart déchiquetées par les éclats d'obus et laissaient filtrer l'eau dans les appartements. Avec cela grande difficulté de se procurer du charbon ; on brûlait des débris de planches, de poutres, de baraquements, des brindilles que l'on trouvait. Et dire que tout en se plaignant, en souffrant on était heureux de se retrouver chez soi malgré les ruines et la détresse. Comme on n'avait plus de mobilier tout ayant été pillé par les Allemands et autres profiteurs, on se contentait de moyens de fortune pour avoir au moins une couche pour dormir. Il faut néanmoins signaler les nombreux dons en nature qui furent alors envoyés par la Croix-Rouge américaine de Reims ; cela fit grand bien à toute la pauvre population et ces distributions de lingerie, de vêtements, etc, se sont renouvelées assez souvent, p. 176 – 177.

Reprise de la vie Sociale et religieuse.

Le temps s'écoule, on reprend les travaux des champs et beaucoup d'hommes s'enrôlent dans les régions libérées pour le déblaiement des ruines, des routes, au détriment de la culture qui manque de bras.
La vie religieuse elle-même reprend son cours dans une pauvre église dévastée. Le curé était parti le 27 mai 1918 sur l'ordre d'évacuation. Le curé, l'abbé Galland s'était réfugié chez M,
Fernand de Bracquemont à Rabastens sur Tarn, Tarn, propriétaire du château de Courville qui l'accueillit et le retint pendant 7 mois 1/2 avec la plus franche cordialité ; il put rendre service aux deux paroisses de la ville pendant son séjour. Il n'a pu rentrer que le 21 janvier 1919 pour reprendre les fonctions du culte avec les dons qu'il reçu en nature de l'Œuvre des églises-dévastées et de plusieurs amis, mais dans une église complètement ouverte à toutes les injures du temps : toitures crevées, murs éventrés, fenêtres sans aucune vitre et cela dura ainsi trois années. P. 178.

Croix de Guerre.

Le journal officiel du 6 Juin 1921 enregistra l'arrêté ministériel du 30 Mai 1921 ainsi conçu : «  COURVILLE vaillante cité qui parmi les nombreux bombardements subis, ses souffrances et ses ruines a bien mérité du pays ». La Croix de Guerre lui a été décernée dans une cérémonie officielle à Reims ; et la citation et la Croix de Guerre sont encadrées dans la salle de la mairie de Courville. P. 160-181.

1926. 10 juin.

Mise en vente de la propriété dite château de Courville, 5 hectares 80, sans les dommages de guerre. Elle a été achetée 19 000 francs par M, Charlaté qui habite les communs en ruines ou du moins très détériorés par la vétusté et par la guerre. P 184. (NDLR : 1 franc de 1926 valait environ 0. 59 € de 2008 )

Territoire de Courville.

Description d'après un auteur du XVIII° siècle, puis l'abbé Galland conclut :
Actuellement au XX° siècle, il y a transformation complète dans l'exploitation du sol du pays. On a abandonné les vignes peu à peu par suite des mauvaises récoltes, de gelées, des maladies, ainsi que la culture du chanvre et des pois ; par contre on a donné plus d'extension aux plantations de pommes de terre ; le commerce des légumes : carottes, poireaux et oignons est fait de préférence. Quant à l'exploitation des carrières elle occupe un certain nombre d'ouvriers pour l'extraction et son façonnement. Le restant du sol est consacré à la culture du blé, de l'avoine, des betteraves fourragères et sucrières et aux prairies artificielles et naturelles. Il y a actuellement (1926) 20 cultivateurs tant fermiers que propriétaires ; ils ont beaucoup de courage et de mérite pour accomplir leurs durs travaux, car les bras font de plus en plus défaut, les hommes préférant chercher en ville des situations plus lucratives et moins absorbantes, ou s'engager dans les travaux précaires des régions libérées pour gagner beaucoup, avec une somme moindre de travail. Il y aura des déceptions… P. 186, dernière du texte !

N.B. Courville comptait 439 habitants en 1912, 399 en 1914, 369 en 1920, 395 en 1926 et 136 électeurs inscrits.

Note de Michel de Chantérac

En recevant ce cahier dédicacé, Papa, a remercié chaleureusement l'abbé Galland… même de façon concrète, ainsi qu'en fait foi la carte reproduite ci-dessous. Cete carte est aussi un fac-similé de l'écriture à l'encre violette du cahier dont j'ai voulu reproduire l'essentiel concernant notre famille… ou les passages qui m'ont le plus frappé-. • ou intéressé.
Merci à mon frère Jean de m'avoir donné la possibilité de le faire.
Chaumont. Janvier 1985. Michel de Chantérac.

Annexe « Les feuilles tombées »

Dans ses mémoires « Les feuilles tombées », par une note, Maman fait allusion au passage du cahier du Curé de Courville où il est fait état du «  séjour » de Mazarin à Courville. Voici donc ce texte :

Cardinal Barberin.

A cette époque c'est le Cardinal Antoine Barberin ou Barberini qui est archevêque de Reims (1651-1671). Barberini, illustre famille florentine dont un des membres fût élu pape en 1623, sous le nom d'Urbain VIII. D'après les historiens rémois, le Cardinal n'était pas en odeur de sainteté auprès de ses ouailles de Reims ; c'est pourquoi il résidait très peu en son palais de Reims ; son séjour préféré était son château de Courville, d'après la tradition. Ce qui le prouve, c'est la présence de son personnel au dît château. Nous voyons en effet dans les actes de baptêmes de 1666, 1668, 1670 que son aumônier Mr de La Londe, son secrétaire M. Christophe Cianquy, Mre. Pierre Parlot promoteur de l'officialité de Reims sont aux baptêmes de plusieurs enfants, de plus Antoine Baudiot dit la Forest, son valet de chambre, est à quatre reprises parrain dans plusieurs familles ; cela démontre bien le séjour prolongé du Cardinal Antoine Barberin en son château de Courville.
On a rapporté que le Cardinal Mazarin (1602 – 1661) son ami et son protecteur était venu se réfugier à Courville au moment de son exil. Le Baron Taylor dans son «  Voyage dans l'ancienne France » T. 1 p. 205, en parlant du Château de Courville est pénétré de cette légende, car il dit « Le château de Courville où Mazarin fût exilé etc…  » L'abbé Valentin dans son histoire du Canton de Fismes dit aussi à l'article « Courville » que le cardinal Mazarin exilé à Courville en 1651 allait à l'église de Courville par une galerie sur arcade et assistait aux offices de la chapelle haute de St. Nicolas, sur le narthex (c'est-à-dire à la tribune). La tradition populaire ajoute même que Mazarin y fût prisonnier et s'est accréditée cette légende qu'il était enfermé dans la grosse tour qui communiquait avec la chapelle haute de l'église (chapelle St. Michel) pour pouvoir assister à la messe. Par suite de cela on s'est mis à désigner cette chapelle du nom de chapelle Mazarin : il est curieux de constater que cette erreur est encore fortement accréditée. C'est toujours la chapelle Mazarin et non la chapelle St. Michel.
Il n'est pas étonnant que le Cardinal Antoine Barberini ait été l'ami du cardinal Mazarin, car c'est le pape Urbain VIII, un Barberini, comme nous l'avons dit plus haut, qui revêtit de la pourpre Mazarin sur les instances du cardinal Richelieu et du roi Louis XIII, par contre Mazarin fit nommer au siège de Reims Antoine Barberini le neveu d'Urbain VIII.
Nous ne nions pas la venue, le passage du cardinal Mazarin au château de Courville, c'est très vraisemblable, comme nous le disons plus loin, mais non d'abord comme prisonnier ; peut-être s'y est-il réfugié quelques jours, quelque temps avant de se rendre à Rethel et de là sur Cologne, on n'en a aucune donnée. On possède toutes les lettres de Mazarin écrites pendant son exil, et, affirment les chercheurs, il n'y en a aucune qui fasse mention de son séjour à Courville ou qui soit datée de Courville.
Quand nous entendons les habitants de Courville désigner la chapelle haute de St. Michel sous le nom de chapelle Mazarin, nous pouvons ajouter que cette erreur a peut-être quelque fondement : le peuple a confondu à la longue les deux noms de Mazarin et de Barberin : comme le cardinal Barberin résidait souvent à Courville et disait sa messe à la chapelle St. Michel on aura d'abord appelé celle-ci : chapelle Barberin et plus tard, chapelle Mazarin.
Ajoutons enfin ce que nous avons entendu raconter par un habitant de Courville : Armand Barot (1837 – 1915) homme digne de foi. Vers 1860 il travaillait à des ouvrages de terrassement dans le parc du château pour le compte de M. Menesson homme d'affaires, mandataire des héritiers Legoix propriétaires d'une partie du domaine, il trouva un anneau pastoral en or et le remit moyennant récompense (50 francs) au sieur Menesson, domicilié à Braisne, Aisne. Celui-ci aurait constaté que les armoiries gravées au centre de l'anneau pastoral étaient celles du Cardinal Mazarin. Si les affirmations du Sr, Mennesson sont exactes, ce serait un indice de la présence de Mazarin au château de Courville, mais cela ne prouverait pas du tout qu'il y fût exilé. P. 92 à 95.

Annexe « Monographie de Courville »

Extrait de «  La valée de l'ARDRES » par l'abbé CHEVALIER Curé de Tramery. Reims 1893

COURVILLE

A peu de distance de Crugny on aperçoit dans le lointain et au pied de la côte le village de Courville éloigne de Crugny de trois kilomètres et demi, la haute et belle tour de son église, le château avec ses tourelles, contribuent beaucoup à la beauté du site de ce village.
La terre de Courville avait été donnée aux archevêques de Reims par Warat et était devenue le siège de l'une des sept châtellenies établies vers 1179 pour former l'apanage du duché de Reims ; cette châtellenie avait sous sa juridiction les villages de. Mont-sur-Courville, St-Gilles, Cohan, Unchair, Savigny, Breuil, Prémecy et Courlandon ses dîmes exceptées. Avant l'institution de cette châtellenie les archevêques de Reims avaient des possessions à Courville, Ainsi qu'on le voit dans une charte de Philippe 1er en 1067 ; les papes Alexandre III en 1170 et Innocent III en 1205 confirmèrent les archevêques de Reims dans la possession de ce domaine 1.
Parlant du château de Courville. le baron Taylor dit : «  Le château de Courville où Mazarin fut exilé, et qui servit ensuite de résidence aux archevêques de Reims, est placé à mi-côte d'une colline boisée. Cet édifice, d'une origine très ancienne, et reconstruit à la fin du XVeme siècle, avait échappé aux dévastations révolutionnaires ; mais, malheureusement, on a commencé depuis peu la démolition. L'église du village servait autrefois de chapelle au château, on y arrivait par un passage suspendu qui partait d'une tour aujourd'hui abattue, et aboutissait à la partie supérieure de la nef. Cette église est surmontée d'un élégant clocher, elle est de construction romane.  » 2 Le baron Taylor semble dire que le château de Courville ne devint résidence des archevêques de Reims qu'après l'exil du cardinal Mazarin, nous verrons par la suite, qu'ils en firent leur résidence bien avant l'exil du célèbre ministre.
château_de_courville
La démolition dont parle le baron Taylor n'a pas été complète, elle s'est bornée probablement à certaines dépendances et à la tour qui communiquait avec la nef supérieure de l'église, cette tour existait près de la partie gauche du château. De cette tour une galerie couverte conduisait à l'église supérieure. Le château proprement dit n'a pas été détruit, mais restauré, et il nous apparaît aujourd'hui tel qu'il était à la fin du XVéme ou au commencement du XVIéme siècle ; les écussons des archevêques de Reims que l'on voit aux portes et à une mansarde, n'ont pas été mutilés non plus que celui qui avait été sculpté sur un colombier dépendant du château. L'enceinte fortifiée de ce dernier a disparu. , il reste encore un débris de tour éventrée près du château et de la maison commune. La vue que nous donnons de ce château nous dispensera d'en donner la description.


  1. 1 : Marlot. Histoire de Reims. T. Il, p. 728, – L'abbé Valentin, Histoire du Canton de Fismes, pages 38 et 39.
  2. 2 : Baron Taylor, Voyage dans l'ancienne France. T1 p205

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